La néo-banque Revolut propose un compte avec une carte prépayée pilotable depuis une application mobile. Le point avec Emmanuel Boulade, Responsable Communication France, Suisse & Belgique.
IN Banque : Que propose Revolut aujourd’hui ?
Emmanuel Boulade : Une de nos forces, c’est le taux de change pour les voyageurs. Nous sommes les seuls à proposer le taux de change interbancaire – celui qui est habituellement réservé aux banques entre elles – actualisé en direct, et sans prélever aucun frais. C’est le cas en semaine, quand les marchés de devises sont ouverts. Pendant le weekend, lorsque les marchés de devises sont fermés, nous appliquons 0,5% de frais sur les principales devises pour nous couvrir d’une éventuelle forte baisse à l’ouverture le lundi matin.
Et qui dit produit axé voyageurs, dit comptes multidevises. Avec votre compte Revolut, vous avez en fait le droit à 25 comptes avec des devises différentes. Vous pouvez faire le change en direct dans l’application. Lorsque vous êtes à l’étranger, la carte détecte automatiquement la devise et va piocher dans le compte local.
Nous proposons également notamment l’envoi d’argent instantané entre utilisateurs, des outils de budgétisation intégrés, des assurances, une plateforme de trading de cryptomonnaies… Nous avons aussi une fonction de partage d’addition qui est très utilisée. Et même, dans notre formule la plus complète, un service de conciergerie qui fonctionne partout dans le monde. Vous pouvez acheter un billet d’avion ou faire une réservation au restaurant par exemple. Il donne également accès aux salons d’aéroport à des tarifs privilégiés.
Quels sont les nouvelles fonctionnalités à l’étude ?
Ce que nous ne proposons pas encore, mais qui devrait arriver assez rapidement, c’est de l’investissement en actions. Nous espérons lancer au premier trimestre 2019 une plateforme de trading sans aucun frais de courtage – c’est là l’un des points de friction les plus importants avec les jeunes générations. De plus, les plates-formes de trading en ligne en France ont des interfaces austères et dépassées. Là, tout sera faisable en quelques clics au sein d’une application fluide et favorisant l’expérience utilisateur. C’est un produit sur lequel nous investissons beaucoup de temps et d’argent parce que il y a bien besoin de dépoussiérer ce secteur.
Nous lancerons également un autre produit d’investissement de type robo-advisor. Il y en a plusieurs au Royaume-Uni, et un peu moins en France. Il s’agit d’investissement en fonction d’un profil de risque définit à l’avance après avoir répondu à quelques questions. A la fin du questionnaire, nous pourrons déterminer le profil de chaque utilisateur, et leur dire par exemple : vous avez un profil offensif donc on va partir sur 70% d’actions et 30% d’obligations, ou alors vous avez un profil plutôt défensif, donc on va s’orienter surtout vers des obligations. Tout cela sera investi sous forme d’ETF avec des frais beaucoup moins élevés.
Nous ne proposons pas encore de découvert ou d’intéressement sur l’épargne, mais nous espérons le faire à terme. Ce n’est pas d’actualité car nous sommes pour le moment un établissement de paiement,et pas encore un établissement de crédit.
A contrario, qu’est-ce-que vous ne proposez pas, voire ne proposerez jamais ?
Nous avons aujourd’hui une offre de crédit mais uniquement disponible au Royaume-Uni. Nous travaillons avec un partenaire qui s’appelle « Lending Works » et qui permet d’emprunter jusqu’à 25 000 pounds, de façon quasi instantanée. Vous faites la demande de crédit, nous vous posons des questions, mais nous vous connaissons aussi grâce à votre historique de transactions sur Revolut. Ainsi, nous sommes capables d’allouer une sorte de credit score qui permet de valider ou non la demande. Si tout est en ordre, ça ne peut prendre que quelques minutes avant que vous ne receviez l’argent.
Avec une licence d’établissement de crédit, pour laquelle nous avons déposé une demande fin 2017 – et dont nous espérons avoir une réponse avant la fin de l’année – nous serons en mesure de proposer nos propres produits : des découverts, du crédit à la consommation etc. En revanche, nous n’avons pas vocation à couvrir l’ensemble de l’offre bancaire. Il ne faut jamais dire jamais, mais a priori, nous ne proposerons pas, ni à court, ni à moyen terme, de crédits immobiliers. Et ce pour une raison très simple. Chez Revolut, nous ne proposons que des produits qui, selon nous, répondent à trois critères : plus simple, moins cher et plus efficace que ce qui existe déjà sur le marché. Sur le crédit immobilier, on parle de montants d’emprunt très élevés, qui demandent beaucoup de vérifications et de paperasse, je ne pense pas que quiconque sur le marché arrive à disrupter et simplifier cette activité.
Les acteurs traditionnels du marché, mais aussi beaucoup de nos concurrents fintechs et néo-banques, se précipitent sur des offres faciles à monnayer, rentables, comme le crédit. Mais, contrairement à certains, nous n’avons pas l’intention de dupliquer toute votre banque sur votre smartphone. Nous voulons vraiment changer les choses en repartant de zéro.
Sur quels outils innovants misez-vous pour accompagner et rassurer vos clients ?
Ce n’est pas le plus évident, mais la première chose que vous voyez quand vous ouvrez un compte chez Revolut, ou chez certains de nos concurrents – en tout cas ceux qui arrivent à bien le faire – c’est l’onboarding. Jusqu’ici, ouvrir un compte en banque prenait trois semaines, et on vous posait toutes les questions possibles et imaginables. Dans le KYC, les banques traditionnelles vous posaient énormément de questions pour pouvoir vous offrir tous leurs produits. Sauf que c’est extrêmement chronophage. Nous avons décidé d’inverser le paradigme. Nous nous sommes dit : de quoi a-t-on besoin au minimum pour ouvrir un compte ? Je détaillerai notre approche lors de mon intervention dans le cadre d’IN BANQUE le 7 février.
Ce qui rassure les clients, c’est toute la notion d’instantanéité. Lorsque vous faites un paiement avec une carte Revolut, vous avez une notification qui apparaît sur votre téléphone avant même que le ticket ne sorte du terminal du commerçant. Pour faire un virement à un ami qui est sur Revolut, c’est instantané. Pour faire un virement vers une banque traditionnelle, il ne met que quelques heures pour arriver. Ce n’est jamais aussi court chez les banques traditionnelles car a priori, nous sommes plus efficaces. De plus, n’étant pas un établissement de crédit, nous n’avons pas le droit de spéculer avec l’argent de nos clients. Donc nous envoyons directement les sommes plutôt que de les garder 24 heures dans le but de les faire fructifier.
Pour rassurer les clients, il y a aussi la possibilité de sécuriser sa carte de manière très poussée. Aujourd’hui, le blocage / déblocage instantané dans l’application commence à se standardiser. Mais il y a trois ans, nous étions parmi les premiers à le faire.
Nous avons lancé il y a trois mois des systèmes que le client ne voit pas, qui font partie de notre petite cuisine interne. Il s’agit d’un outil technologique anti fraude à la carte de paiement et qui utilise le machine learning. Donc, plus il y a de transactions, et plus il devient précis. Il établit un profil très fin de chacun des clients Revolut. C’est outil très efficace nous a permis de diviser par quatre le nombre de fraudes à la carte : là encore je détaillerai le dispositif, et d’autres encore, lors d’IN BANQUE 2019.
Qu’en est-il de votre développement à l’international ?
Revolut a été créé au Royaume Uni. Le siège est à Londres et il le restera – quelle que soit l’issue du Brexit. A l’heure actuelle, nous sommes disponibles dans 31 pays de l’espace économique européen. Nous avons une dizaine de bureaux en Europe. Le siège est à Londres, où nous avons 200 employés, mais le plus gros bureau est à Cracovie où nous avons 300 personnes, et une cinquantaine de nouveaux employés nouveaux chaque mois. Il y a aussi deux gros bureaux à Moscou et à Saint Petersbourg avec beaucoup de développeurs, d’ingénieurs et de designers. A Paris, Barcelone, Berlin, Vilnius… ce sont plus des bureaux de représentation.
Nous pensons que l’argent ne devrait pas connaître de frontières. Notre ADN, c’est d’être mondial et de nous développer partout. En 2018, l’argent est une ligne informatique sur un ordinateur, ou sur un serveur. Aujourd’hui, nous sommes dans une phase d’expansion très agressive. Fin 2018 / début 2019, nous allons ouvrir des bureaux dans une dizaine de pays sur trois continents : Etats-Unis, Canada, Hong Kong, Singapour, Japon, Australie, Nouvelle-Zélande… Nous travaillons aussi sur l’Inde, l’Afrique du Sud, le Brésil et l’Argentine. A terme, on veut couvrir le monde entier. C’est notamment pour financer cette expansion que nous avons fait une levée de fonds de 250 millions d’euros en avril 2018. Recruter, cela demande des fonds, tout comme demander des licences bancaires dans chaque pays, car il faut immobiliser des fonds propres pour parer à toute éventualité.
Emmanuel Boulade sera présent le 7 février lors d’IN BANQUE 2019 pour partager sa vision de la banque de demain.