
Déléguée Générale
France FinTech
France FinTech est l’association à but non lucratif représentative de l’écosystème des fintech françaises. Créée en 2015 à l’initiative d’entrepreneurs, elle s’est fixée comme objectif de promouvoir et faire connaître le secteur, le représenter vis-à-vis de ses parties prenantes, pouvoirs publics et régulateurs notamment, en France et dans le monde et animer sa communauté. Entretien avec Kristen Charvin, sa déléguée générale.
IN Banque : Quels sont les priorités 2025 de France FinTech et plus largement comment se porte la fintech française ?
Kristen Charvin : Le domaine réglementaire est le premier aspect que j’évoquerais. La période est intense à cet égard, avec des conséquences profondes en termes de structuration de l’activité, de nouvelles contraintes, mais aussi d’opportunités de développement.
Parmi les thèmes d’actualité, nous pouvons citer , le Règlement MiCA mis en application depuis 2024, qui régit la commercialisation, la transparence et la surveillance des actifs numériques, le règlement DORA (Digital Operational Resilience Act), qui a pour objectif de renforcer la résilience opérationnelle numérique du secteur financier entre autre ou encore le règlement européen FIDA (ndlr: autour de l’accès aux données financières) Il serait réducteur de ne voir ce règlement que comme une contrainte. Il permet en effet de construire des modèles plaçant le “client au centre” en le rendant maître de ses données. Il ouvre par ailleurs la voie à la création de meilleurs services à son bénéfice. Certes, fintech et acteurs financiers plus traditionnels n’ont pas toujours la même lecture de FIDA, , mais cette évolution va globalement dans le bon sens à notre avis.
Une autre priorité est la poursuite du développement dans un environnement très contraint en matière de financement et dans un contexte macroéconomique incertain. A ce propos, le secteur de la fintech française a connu une année 2024 plus favorable que ses homologues européens et même que les autres secteurs de la tech française. Le premier trimestre 2025 a enregistré un montant cumulé de 327 M€ contre une moyenne trimestrielle de 318 M€ en 2024, soit une légère hausse de 3 %. Cela s’explique par de bons fondamentaux économiques, mais traduit aussi une confiance des investisseurs dans les modèles fintech en France et dans les femmes et les hommes qui la font.
Comment caractériser d’ailleurs les fintechs françaises par rapport à leurs homologues européens ou internationaux ? Quels sont nos atouts spécifiques ?
Nous disposons d’un écosystème riche et solide de plus de 1 100 entreprises de toutes tailles. L’écosystème couvre un large éventail de besoins : services bancaires et d’assurance, gestion d’actifs, paiements, financements, regtech, services aux entreprises et gestion des risques. Le secteur compte 13 licornes (ndlr : valorisation est supérieure à 1 milliards d’euros) parmi lesquelles Pigment, Pennylane, Alan, ivalua, Ledger, PayFit, Qonto, Shift, Spendesk, Swile, Sumeria, Younited, Dataiku et Kyriba. Ce sont des champions dans plusieurs catégories là où, dans d’autres pays, certaines licornes font figure d’arbres qui cachent une forêt plus clairsemée. Les levées de fonds sont souvent moins spectaculaires qu’aux États-Unis ou au Royaume-Uni, mais les modèles d’affaires sont très solides . Par exemple, Pennylane a atteint le statut de licorne avec une levée de “seulement” 40 millions, et a récemment doublé sa valorisation avec une nouvelle levée de 75 millions. Si on voulait simplifier avec une formule, on pourrait dire que la fintech en France c’est de la bonne technologie au juste prix. Il faut rappeler que nous disposons dans ce pays de très bonnes formations scientifiques, et si, oui, quelques talents partent à l’étranger, notre vivier reste foisonnant.
Il manque sans doute de grands investisseurs au niveau européen pour marquer un plus grand passage à l’échelle. Nous travaillons avec le gouvernement, et d’autres associations, pour réfléchir aux problématiques de financement et de capital risque, d’accès à la cotation et de fléchage de l’épargne.
Au delà du financement, certes extrêmement important, comment concilier les rythmes différents de l’innovation On doit veiller à un juste équilibre entre contraintes justifiées et établissement de standards bénéfiques. Non seulement la réglementation n’empêche pas d’innover, mais sur certains aspects elle peut s’inscrire en avance de phase sur l’usage. Parmi les sujets technologiques qui dominent figurent la blockchain et bien sûr l’IA. L’événement FinTech R:Evolution du 21 mai prochain permettra de débattre de ces aspects.
Lors de la conférence IN BANQUE du 19 juin 2025, nous allons beaucoup parler de l’équilibre entre la technologie /l’automatisme et l’humain. Les fintechs françaises ont-elles aussi cette compétence ?
Bien sûr. Et pas seulement les fintech mais aussi les grands acteurs dits traditionnels..La technologie et notamment l’intelligence artificielle permet de réduire les coûts, d’augmenter les performances, de réduire les risques d’erreur, et d’automatiser les tâches à faible valeur ajoutée. Cela permet de libérer du temps à consacrer en particulier au conseil. C’est le concept de conseiller augmenté. L’équilibre entre technologie et humain dépend finalement de la nature de la question posée. Certains sujets simples et factuels relèvent du numérique, tandis que les enjeux complexes comme la retraite, la transmission ou la fiscalité nécessitent souvent un échange humain fondé sur la confiance, l’écoute et l’intelligence relationnelle et émotionnelle. De ce point de vue, les fintechs trouvent les ressources humaines expertes pour s’adapter à ces fameux moments où le client, même s’il souhaite être autonome à d’autres occasions, à besoin d’une interaction humaine de qualité.
Encore une fois, j’insiste sur le fait qu’en France, notre singularité est à la fois dans notre excellence scientifique et technologique, mais aussi dans nos valeurs, notre philosophie.
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