Membre du Directoire, Directeur du Développement d’Arkéa Investment Services, Guillaume David fait le point sur l’actualité de la filiale du Crédit Mutuel Arkéa. Au menu : explosion des données, critères ESG et alliance entre le digital et l’humain.
IN Banque : Que représente le groupe Crédit Mutuel Arkéa aujourd’hui, et plus particulièrement la filiale Arkéa Investment Services ?
Guillaume David : Le Crédit Mutuel Arkéa, dont la base historique se situe en Bretagne et dans le Sud-ouest de la France, a aujourd’hui une présence nationale sur de nombreux métiers. Depuis 2022, nous sommes aussi une entreprise à mission avec comme ambitions fortes de soutenir le développement des territoires et mettre en œuvre une finance qui accompagne les transitions environnementales et sociales. Nous sommes aussi la première banque, cette année, à avoir présenté une performance globale, c’est-à-dire financière et extra-financière.
Notre groupe de bancassurance qui regroupe plus de 11 000 collaborateurs, est complet en termes de métiers avec notamment des réseaux bancaires avec le Crédit Mutuel de Bretagne et le Crédit Mutuel du Sud-Ouest ; la banque en ligne Fortuneo ; le spécialiste assurance-vie, retraite et prévoyance Suravenir ; Arkéa Banque Entreprises & Institutionnels et Arkéa Investment Services, où je suis Directeur du Développement.
Arkea Investement Services, forte de plus de 300 collaborateurs, regroupe la gestion d’actifs et de la banque privée du groupe. Nous gérons et conseillons plus de 67 milliards d’euros d’encours. Notre modèle est multiboutiques avec 3 métiers : la banque privée avec Arkea Banque Privée, l’immobilier avec Arkéa Real Estate et Arkéa REIM et la gestion d’actifs (cotés et non cotés) avec Federal Finance Gestion, Schelcher Prince Gestion et SWEN Capital Partner.
Quels ont été les impacts du contexte économique et social sur les comportements d’épargne et d’investissement ?
L’inflation et le niveau des taux ont augmenté à une forte cadence ces derniers mois. Désormais, avec une inflation autour des 6 % et un Livret A à 3 %, nos clients constatent que leurs économies en pâtissent. Ils cherchent donc des placements alternatifs, et c’est ainsi que nous observons un retour en grâce du marché obligataire. Il nous faut donc faire preuve d’innovation pour proposer des investissements adaptés à ce nouvel environnement.
Dans ce contexte incertain, comment la finance responsable trouve-t-elle sa place ?
Cela fait plusieurs années que de nombreux acteurs du marché, y compris le Crédit Mutuel Arkéa, ont la volonté d’orienter l’épargne pour accompagner les transitions en proposant des fonds intégrant les critères ESG (Environnement, Social, Gouvernance).
2022 a été une année charnière sur le sujet. La mise en application de directives européennes, qui obligent à demander aux souscripteurs ses préférences en termes de durabilité avant de souscrire à un fonds, contraint l’ensemble des sociétés à prendre en compte les critères extra-financiers dans leur gestion. Mais nous sommes dans « une crise d’adolescence de l’ESG », et ces critères sont encore en cours de maturation.
Quelques écueils demeurent, notamment sur le calcul du pourcentage d’investissement durable, qui est déclaratif et peu normé; mais aussi la taxonomie et les Principales Incidences Négatives (PAI) , qui ne pas encore bien connues par les investisseurs. Ces dernières données ne sont pas quantitatives – mais qualitatives : il est donc compliqué pour le client de s’y référer. J’en parlerai davantage au cours de mon intervention le 22 juin lors d’IN BANQUE 2023.
Face à ces trous dans la raquette, comment se positionne Arkéa Investment Services ?
Notre démarche, aussi bien au niveau d’Arkéa IS que du Groupe, a été de favoriser les labels. L’obtention de labels est conditionnée à un cahier des charges strict et à un audit externe par un labellisateur apprécié par les clients finaux.
La donnée ESG est devenue clé pour les sociétés de gestion et les distributeurs. Pour donner un ordre d’idées, au sein d’Arkéa Investment Services, le nombre de data points ESG a été multiplié par quinze en un an, en passant de 16.000 à 250.000. Nous déplorons la dépendance forte aux fournisseurs de données extra-financières qui, à l’origine en majorité Européens, ont été très largement racheté par les Américains. Cela pose également des questions en termes de souveraineté des données et peut potentiellement avoir un impact sur notre propre réglementation.
Quel est, selon vous, le juste équilibre entre touche humaine et automatisation du conseil et de la gestion ?
Côté gestion d’actifs, depuis plusieurs années, nous assistons à une explosion des données – qu’elles soient financières, ESG ou autres. Cela nécessite de travailler de plus en plus avec des data scientists et des développeurs qui vont permettre de trier ces flux d’informations, ce que l’humain ne peut plus faire seul, puis d’identifier celles dont les gérants de portefeuilles ont besoin. C’est créateur de nouveaux métiers dans notre secteur.
Mais l’humain est toujours indispensable pour vérifier la data (par exemple entre deux fournisseurs de data ESG, il peut y avoir des notations complétement divergentes) et pour l’utiliser pour créer de la performance financière dans les portefeuilles que nous gérons.
Côté banque privée, il faut pouvoir apporter une offre digitale au moins du niveau d’une banque en ligne pour une utilisation au quotidien de nos clients tout en déployant un conseil humain pour leur accompagnement patrimonial ; et c’est là que nous observons la complémentarité entre l’humain et le digital. Le banquier, délesté de nombreuses tâches, va pouvoir trouver le temps nécessaire pour faire du sur-mesure pour son client, ce qui est l’élément différenciant clef de la banque privée.
Guillaume David interviendra sur le thème « Épargne, investissement : les nouveaux services à l’ère des plateformes numériques » lors de l’événement IN BANQUE 2023 le 22 juin à Paris.